Édition du 7 avril 2025
Projet de loi 81 : le ROBVQ rappelle l’importance d’ancrer les décisions dans les connaissances du territoire
Dans le cadre des consultations sur le projet de loi 81 qui modifie plusieurs lois environnementales au Québec, le Regroupement des organismes de bassins versants du Québec (ROBVQ) a déposé, le 3 février dernier, un mémoire afin de faire entendre la voix des acteurs de l’eau. L’objectif : rappeler que l’efficacité des autorisations environnementales et des démarches gouvernementales repose sur une connaissance fine et partagée du territoire.
Le projet de loi 81, qualifié d’« omnibus environnemental », propose entre autres de revoir la procédure d’évaluation environnementale, de modifier le régime d’autorisation ministérielle pour les milieux humides et hydriques, et d’introduire le principe de « conciliabilité » entre les règlements provinciaux et municipaux. Il prévoit aussi une nouvelle procédure d’évaluation environnementale, sectorielle ou régionale. Bien que ces changements visent à accroître l’efficacité administrative et à mieux répondre aux enjeux contemporains, le ROBVQ insiste sur un fondement trop souvent négligé : l’importance cruciale de l’acquisition de connaissances sur les milieux.
La connaissance : fondement de la prise de décision
Le ROBVQ souligne dans son mémoire que toute décision d’aménagement du territoire, particulièrement en lien avec l’eau, devrait s’appuyer sur des données fiables, à jour et intégrées. Or, dans plusieurs régions, cette connaissance est fragmentée ou insuffisamment mobilisée par les autorités gouvernementales. Les organismes de bassins versants (OBV) du Québec, qui coordonnent la gestion intégrée de l’eau par bassin versant (GIRE), sont des partenaires de première ligne pour bâtir cette connaissance territoriale, mais encore faut-il que les structures gouvernementales les reconnaissent à leur juste valeur.
À cet égard, le projet de loi 81 ne va pas assez loin. Les ajustements proposés à la procédure d’autorisation ne s’accompagnent pas de mécanismes concrets pour renforcer les liens entre les directions régionales du ministère de l’Environnement et les acteurs de terrain, comme les OBV ou les MRC. Or, ces liens sont essentiels pour que les décisions ministérielles prennent réellement en compte les réalités locales et les enjeux hydriques spécifiques à chaque bassin versant.
Des directions régionales déconnectées du terrain
Le ROBVQ s’inquiète également du rôle limité des directions régionales du ministère de l’Environnement, principalement composées d’analystes responsables du traitement des demandes d’autorisation. Trop souvent, leur intervention se limite à une analyse technique des projets, sans interaction avec les dynamiques de concertation et les données issues des Plans directeurs de l’eau (PDE). Le risque est réel : une prise de décision basée sur une vision partielle du territoire, et donc potentiellement inadaptée ou contre-productive.
Pour y remédier, le ROBVQ recommande que les directions régionales intègrent une fonction de liaison territoriale, chargée de maintenir des échanges réguliers avec les OBV, les MRC, les Conseils régionaux de l’environnement (CRE) et autres acteurs locaux. Cette connexion terrain-ministère est essentielle pour alimenter les décisions en informations pertinentes, valider les enjeux identifiés localement et renforcer la cohérence des actions.
Un appel au renforcement de la concertation
Enfin, le ROBVQ rappelle que la gestion durable de l’eau repose sur une approche de concertation territoriale. Depuis l’adoption de la Politique nationale de l’eau et de la Loi sur l’eau, le Québec s’est doté d’un modèle original de gouvernance par bassin versant. Il serait regrettable que les réformes proposées dans le projet de loi 81 viennent fragiliser cette approche, en recentralisant les décisions ou en marginalisant les acteurs du territoire.
À l’inverse, le ROBVQ propose que le gouvernement renforce sa participation aux démarches de concertation régionales, notamment à travers la reconnaissance formelle des PDE dans les processus d’autorisation et d’évaluation. Il invite également le ministère à mettre en place des mécanismes d’arrimage entre les nouvelles évaluations sectorielles ou régionales prévues par le projet de loi et les outils déjà en place sur le terrain.
Pour en savoir davantage, vous pouvez consulter le mémoire déposé dans le cadre des consultations publiques ou écouter les représentations du ROBVQ en commission parlementaire sur le Projet de loi 81.