Commission parlementaire sur le projet de loi 81

Édition du 7 avril 2025

Projet de loi 81 : le ROBVQ rappelle l’importance d’ancrer les décisions dans les connaissances du territoire

Écrit par Sébastien Cottinet, ROBVQ

Dans le cadre des consul­ta­tions sur le projet de loi 81 qui modi­fie plusieurs lois envi­ron­ne­men­tales au Québec, le Regrou­pe­ment des orga­nismes de bassins versants du Québec (ROBVQ) a déposé, le 3 février dernier, un mémoire afin de faire entendre la voix des acteurs de l’eau. L’objec­tif : rappe­ler que l’ef­fi­ca­cité des auto­ri­sa­tions envi­ron­ne­men­tales et des démarches gouver­ne­men­tales repose sur une connais­sance fine et parta­gée du terri­toire. 

Le projet de loi 81, quali­fié d’« omni­bus envi­ron­ne­men­tal », propose entre autres de revoir la procé­dure d’éva­lua­tion envi­ron­ne­men­tale, de modi­fier le régime d’au­to­ri­sa­tion minis­té­rielle pour les milieux humides et hydriques, et d’in­tro­duire le prin­cipe de « conci­lia­bi­lité » entre les règle­ments provin­ciaux et muni­ci­paux. Il prévoit aussi une nouvelle procé­dure d’éva­lua­tion envi­ron­ne­men­tale, secto­rielle ou régio­nale. Bien que ces chan­ge­ments visent à accroître l’ef­fi­ca­cité admi­nis­tra­tive et à mieux répondre aux enjeux contem­po­rains, le ROBVQ insiste sur un fonde­ment trop souvent négligé : l’im­por­tance cruciale de l’ac­qui­si­tion de connais­sances sur les milieux. 

La connais­sance : fonde­ment de la prise de déci­sion

Le ROBVQ souligne dans son mémoire que toute déci­sion d’amé­na­ge­ment du terri­toire, parti­cu­liè­re­ment en lien avec l’eau, devrait s’ap­puyer sur des données fiables, à jour et inté­grées. Or, dans plusieurs régions, cette connais­sance est frag­men­tée ou insuf­fi­sam­ment mobi­li­sée par les auto­ri­tés gouver­ne­men­tales. Les orga­nismes de bassins versants (OBV) du Québec, qui coor­donnent la gestion inté­grée de l’eau par bassin versant (GIRE), sont des parte­naires de première ligne pour bâtir cette connais­sance terri­to­riale, mais encore faut-il que les struc­tures gouver­ne­men­tales les recon­naissent à leur juste valeur. 

À cet égard, le projet de loi 81 ne va pas assez loin. Les ajus­te­ments propo­sés à la procé­dure d’au­to­ri­sa­tion ne s’ac­com­pagnent pas de méca­nismes concrets pour renfor­cer les liens entre les direc­tions régio­nales du minis­tère de l’En­vi­ron­ne­ment et les acteurs de terrain, comme les OBV ou les MRC. Or, ces liens sont essen­tiels pour que les déci­sions minis­té­rielles prennent réel­le­ment en compte les réali­tés locales et les enjeux hydriques spéci­fiques à chaque bassin versant. 

Des direc­tions régio­nales décon­nec­tées du terrain 

Le ROBVQ s’inquiète égale­ment du rôle limité des direc­tions régio­nales du minis­tère de l’En­vi­ron­ne­ment, prin­ci­pa­le­ment compo­sées d’ana­lystes respon­sables du trai­te­ment des demandes d’au­to­ri­sa­tion. Trop souvent, leur inter­ven­tion se limite à une analyse tech­nique des projets, sans inter­ac­tion avec les dyna­miques de concer­ta­tion et les données issues des Plans direc­teurs de l’eau (PDE). Le risque est réel : une prise de déci­sion basée sur une vision partielle du terri­toire, et donc poten­tiel­le­ment inadap­tée ou contre-produc­tive.

Pour y remé­dier, le ROBVQ recom­mande que les direc­tions régio­nales intègrent une fonc­tion de liai­son terri­to­riale, char­gée de main­te­nir des échanges régu­liers avec les OBV, les MRC, les Conseils régio­naux de l’en­vi­ron­ne­ment (CRE) et autres acteurs locaux. Cette connexion terrain-minis­tère est essen­tielle pour alimen­ter les déci­sions en infor­ma­tions perti­nentes, vali­der les enjeux iden­ti­fiés loca­le­ment et renfor­cer la cohé­rence des actions.

Un appel au renfor­ce­ment de la concer­ta­tion

Enfin, le ROBVQ rappelle que la gestion durable de l’eau repose sur une approche de concer­ta­tion terri­to­riale. Depuis l’adop­tion de la Poli­tique natio­nale de l’eau et de la Loi sur l’eau, le Québec s’est doté d’un modèle origi­nal de gouver­nance par bassin versant. Il serait regret­table que les réformes propo­sées dans le projet de loi 81 viennent fragi­li­ser cette approche, en recen­tra­li­sant les déci­sions ou en margi­na­li­sant les acteurs du terri­toire.

À l’in­verse, le ROBVQ propose que le gouver­ne­ment renforce sa parti­ci­pa­tion aux démarches de concer­ta­tion régio­nales, notam­ment à travers la recon­nais­sance formelle des PDE dans les proces­sus d’au­to­ri­sa­tion et d’éva­lua­tion. Il invite égale­ment le minis­tère à mettre en place des méca­nismes d’ar­ri­mage entre les nouvelles évalua­tions secto­rielles ou régio­nales prévues par le projet de loi et les outils déjà en place sur le terrain. 

Pour en savoir davan­tage, vous pouvez consul­ter le mémoire déposé dans le cadre des consul­ta­tions publiques ou écou­ter les repré­sen­ta­tions du ROBVQ en commis­sion parle­men­taire sur le Projet de loi 81.