Édition du 2 décembre 2024
Gestion des inondations et soutien aux municipalités : le rôle central des OBV dans le nouveau cadre réglementaire du Québec
Le gouvernement du Québec actualise la réglementation des milieux hydriques, des ouvrages de protection contre les inondations et la délimitation des zones inondables pour la sécurité des citoyens et la protection de l’environnement. Une consultation sur le sujet a été ouverte du 19 juin au 17 octobre derniers. Dans le cadre de celle-ci, le Regroupement des organismes de bassins versants du Québec (ROBVQ) a soumis un mémoire pour commenter le cadre permanent qui sera bientôt en application. Afin de saisir les enjeux entourant la mise à jour de cette règlementation et comprendre la position du ROBVQ, nous avons rencontré Karine Dauphin, directrice générale de l’organisation.
Que sont les zones inondables et les zones de mobilité, et à quoi sert leur cartographie?
K.D.: Les zones inondables sont des espaces susceptibles de recevoir de l’eau lors de crues, reflétant la dynamique naturelle des cours d’eau. L’espace de mobilité est, quant à lui, la zone où le cours d’eau s’est déplacé. Il est établi à partir de photographies aériennes historiques.
Le ROBVQ, dans son mémoire, insiste sur l’importance de la cartographie des zones inondables et des zones de mobilité afin de disposer de données actualisées pour anticiper les risques et éclairer les décisions locales (comme mentionné dans les recommandations du ROBVQ en 2020 à propos du régime transitoire). Le dernier mémoire du ROBVQ recommande une actualisation continue des cartes des zones inondables pour assurer une planification fiable et précise, en s’appuyant sur des programmes comme INFO-Crue, qui intègre de nouvelles données hydrogéomorphologiques.
Cette cartographie permet non seulement de mieux comprendre la dynamique des cours d’eau, mais aussi de faciliter la concertation entre les acteurs locaux pour assurer une gestion cohérente des zones vulnérables à l’échelle des bassins versants.
Quels défis les municipalités devront-elles relever pour gérer les propriétés situées dans les nouvelles zones inondables ?
K.D.: Les municipalités québécoises devront relever des défis complexes face aux nouvelles réglementations sur les zones inondables, notamment en raison de l’application rigoureuse des normes de sécurité. Le mémoire du ROBVQ souligne que les petites collectivités rurales, souvent limitées en ressources financières et humaines, devront être soutenues par des organismes comme les organismes de bassins versants (OBV) pour les accompagner dans cette transition. Le mémoire propose de renforcer le soutien financier et technique des OBV pour permettre un accompagnement efficace des municipalités et minimiser les coûts socio-économiques liés à la mise en conformité.
Le ROBVQ rappelle l’importance d’un soutien accru, soulignant que l’accompagnement par les OBV, par leur expertise et leur proximité avec les acteurs locaux, est essentiel pour éviter des erreurs de planification coûteuses et pour maintenir la cohérence entre les actions locales et les objectifs régionaux. Cela permettrait également de renforcer la résilience des communautés face aux risques climatiques croissants.
Pourquoi l’échelle du bassin versant est-elle cruciale pour une planification efficace contre les inondations ?
K.D.: Dans son mémoire, le ROBVQ insiste sur la nécessité de comprendre l’ensemble d’un système hydrologique en travaillant à une échelle écosystémique plutôt qu’à l’échelle de la zone administrative. La dimension administrative n’englobe que très rarement un lac ou une rivière dans son ensemble.
Les recommandations du ROBVQ préconisent une meilleure intégration des Plans directeurs de l’eau (PDE) et les Plans de gestion intégrée des risques face aux inondations, afin d’assurer une cohérence entre la planification des risques et les réalités locales des bassins versants. Le mémoire critique d’ailleurs l’absence de mécanismes explicites garantissant une telle intégration dans le cadre permanent à venir.
Les OBV, en tant que coordonnateurs de la gestion intégrée de l’eau par bassin versant, peuvent assurer que les mesures prises par les municipalités et autres acteurs locaux soient alignées avec les objectifs globaux, garantissant ainsi une cohérence et une efficacité accrue dans la gestion des risques d’inondation. Cette approche garantit que les efforts de prévention ne soient pas isolés, mais qu’ils s’inscrivent dans une logique globale de gestion intégrée.
Comment les OBV peuvent-ils aider les municipalités à faire face aux inondations ?
K.D.: Le cadre réglementaire actuel ne délègue pas explicitement de nouvelles responsabilités aux OBV, mais reconnaît leur rôle essentiel dans la concertation et l’acquisition de données à l’échelle des bassins versants. Le ROBVQ plaide pour un rôle renforcé des OBV dans l’accompagnement à la mise en œuvre des nouvelles réglementations, en raison de leur expertise en concertation et en mobilisation des acteurs locaux. Le mémoire propose de centraliser davantage la planification des projets de compensation environnementale, comme ceux issus du programme de restauration et de création de milieux humides et hydriques (PRCMHH), sous la coordination des OBV, pour en maximiser les bénéfices écologiques et sociaux.
L’accompagnement des municipalités par les OBV permet de garantir que les mesures de prévention, d’atténuation et de compensation mises en œuvre sont adaptées aux spécificités locales, tout en maintenant une cohérence à l’échelle du bassin versant. Cela permettrait également de réduire les redondances administratives et d’assurer une gestion intégrée et durable des risques d’inondation.
Pour plus de détails, consultez le mémoire du ROBVQ.
Photos d’inondation: COBAVER-VS.