Tadoussac

Édition du 2 décembre 2024

Être à l’écoute de notre territoire

Écrit par Annye Boutillier

Annye Boutillier, ROBVQLes OBV du Québec sont connec­tés direc­te­ment au terri­toire et à ceux et celles qui l’ha­bitent. C’est une force incroyable et cruciale face aux boule­ver­se­ments clima­tiques auxquels nous faisons face. Notre rési­lience collec­tive passe par cette connexion et les connais­sances des enjeux asso­ciés notam­ment aux ressources en eau, mais égale­ment aux rela­tions que nous avons entre nous et avec notre terri­toire et l’en­semble de ses précieuses ressources.  

J’ai appris, en accou­chant, que la douleur, si on l’écoute, aide à travailler avec le corps. De toute façon, le proces­sus ne s’ar­rê­tera pas et, prête pas prête, le bébé doit sortir. On peut faire un paral­lèle avec les chan­ge­ments clima­tiques. C’est un proces­sus qui est enclen­ché, qui fait peur, mais qu’on les ignore ou pas, ils s’in­ten­si­fient, et vite ! C’est effrayant de les obser­ver, mais c’est en les obser­vant qu’on arrive à comprendre ce qui se passe. Tout comme une femme qui accouche, il faut accep­ter notre vulné­ra­bi­lité et cela nous aidera à trou­ver la force néces­saire face aux défis qui se présentent à nous. Il y a un déséqui­libre, une quan­tité immense d’éner­gie à la surface de la Terre et nous faisons partie inté­grante de ce foison­ne­ment.  

On parle beau­coup ces temps-ci de respon­sa­bi­li­sa­tion. Ça m’ap­pa­raît essen­tiel dans ce contexte de chan­ge­ments. Les événe­ments météo­ro­lo­giques extrêmes, on le sait, sont accen­tués par notre présence et notre utili­sa­tion du terri­toire. Par exemple, une séche­resse extrême et jamais vue peut bien sûr être due à l’aug­men­ta­tion de la tempé­ra­ture et la dimi­nu­tion des préci­pi­ta­tions, mais parfois, on se rend compte qu’un barrage vient d’être construit en amont d’une rivière ou qu’on a rasé une section d’une forêt pour faire des routes ou de l’agri­cul­ture. De même, en imper­méa­bi­li­sant les sols et en détrui­sant les milieux humides, on se rend complè­te­ment vulné­rable face aux inon­da­tions. Les chan­ge­ments clima­tiques ont le dos large. Se respon­sa­bi­li­ser, c’est aussi comprendre que nous parti­ci­pons acti­ve­ment à ceux-ci. 

Dans les onto­lo­gies autoch­tones, notam­ment, les êtres humains font partie de la nature et du terri­toire qu’ils partagent avec tous les êtres vivants et les diffé­rents éléments. Il n’y a pas cette dicho­to­mie entre nous et le reste, les espaces natu­rels et les espaces habi­tés. L’es­pace n’est pas segmenté et placé sous diffé­rentes cloches de verre. Tout est connecté ensemble.  

Dans le rythme de nos socié­tés modernes, on court trop souvent après le temps. Ce sont les moments où nous sommes dans notre « ici et main­te­nant » qui permettent de ralen­tir cette course, de retrou­ver le lien avec l’es­pace, notre envi­ron­ne­ment et avec ceux et celles qui en font partie. Ça ne veut pas dire de ne pas penser au futur, ni de ne rien prévoir ou plani­fier, mais simple­ment de s’ac­cor­der des moments de connexion. 

Des orga­nismes comme les OBV sont des piliers de notre rési­lience face aux chan­ge­ments clima­tiques. Selon le prin­cipe de la gouver­nance bottom-up, il faut que les bases soient solides et c’est pourquoi il est primor­dial que les orga­nismes sur le terrain soient soute­nus le mieux possible et qu’ils soient écou­tés et enten­dus.