L’enlèvement du phosphore dans l’angle mort en Gaspésie

Édition du 22 novembre 2021

L’enlèvement du phosphore dans l’angle mort en Gaspésie

Écrit par Philippe Maisonneuve, Fondation Rivières

Au Conseil de l’Eau Gaspé­sie Sud (CEGS), on s’inquiète depuis quelques années de la proli­fé­ra­tion d’algues, présentes notam­ment dans la rivière Bona­ven­ture.  Et si les rejets des stations muni­ci­pales de trai­te­ment des eaux usées contri­buaient au problème? Bien que le minis­tère de l’En­vi­ron­ne­ment et de la Lutte contre les chan­ge­ments clima­tiques (MELCC) publie annuel­le­ment des rapports de perfor­mance sur les ouvrages d’as­sai­nis­se­ment des eaux usées et que l’Atlas sur l’eau donne les infor­ma­tions sur la confor­mité des rejets des effluents pour chacune des stations d’épu­ra­tion qui sont géolo­ca­li­sées, les données actuelles ne permettent pas d’éta­blir un portrait complet à l’échelle du bassin versant.

Le CEGS s’est donc tourné vers Fonda­tion Rivières afin de dres­ser un état de la situa­tion sur son terri­toire. La Fonda­tion a déjà analysé la perfor­mance de plus de 200 muni­ci­pa­li­tés au Québec avec le concours de six OBV. Ces projets s’ap­puient sur l’ex­per­tise d’une équipe spécia­li­sée en assai­nis­se­ment, ainsi que d’une puis­sante base de données rela­tion­nelle conte­nant les données offi­cielles soumises par les muni­ci­pa­li­tés. Grâce aux efforts de concer­ta­tion d’Erika Ouel­let, char­gée de projet au CEGS, la très grande majo­rité des muni­ci­pa­li­tés du terri­toire ont accepté de colla­bo­rer au projet sous la forme d’une entre­vue avec la personne respon­sable de l’ex­ploi­ta­tion et d’un ques­tion­naire détaillé. Ces entre­vues, combi­nées à la connais­sance du CEGS de son terri­toire, se sont révé­lées indis­pen­sables pour la formu­la­tion de recom­man­da­tions adap­tées aux enjeux locaux.

Ce mandat, réalisé cette année, a permis de mettre en lumière de nombreux enjeux en lien avec la gestion des eaux usées. Notam­ment, certaines stations déver­sant leurs eaux usées dans des rivières à saumons, des milieux haute­ment sensibles à l’eu­tro­phi­sa­tion, ne sont pas tenues de procé­der à l’en­lè­ve­ment du phos­phore ni de mesu­rer ce para­mètre à l’ef­fluent. Et c’est un enjeu qui préoc­cupe gran­de­ment les respon­sables des stations d’épu­ra­tion du terri­toire qui nous en ont parlé. En compa­rai­son, à l’échelle du Québec, c’est près de 70% des stations qui possèdent une exigence d’en­lè­ve­ment du phos­phore et l’ef­fi­ca­cité moyenne de ce type de trai­te­ment est de 75%. La norme est établie selon la sensi­bi­lité ou selon le niveau de satu­ra­tion en phos­phore du milieu récep­teur, tel que défini dans la posi­tion minis­té­rielle sur les rejets en phos­phore. Le projet a permis de mieux docu­men­ter les rejets en phos­phore des ouvrages muni­ci­paux d’as­sai­nis­se­ment à l’échelle du bassin versant afin de sensi­bi­li­ser les acteurs locaux dans l’iden­ti­fi­ca­tion de solu­tions concrètes.