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Boîte à outils sur la participation citoyenne

2.2 Les déterminants de la réussite d’une démarche d’acceptabilité sociale

Afin de parvenir à augmenter la participation des acteurs de l’eau, plusieurs moyens sont existants. Les cinq déterminants suivants sont essentiels à considérer afin d’assurer la réussite d’un projet de gouvernance participative comme le PDE.

  • Connaissance des enjeux et des acteurs du milieu
  • Implication d’un maximum d’acteurs en amont du processus décisionnel
  • Arène de communication propice aux échanges constructifs et arrimée aux attentes des parties prenantes
  • Présence d’un sentiment d’appartenance au projet
  • Prise en compte des perceptions et des représentations sociales (le bruit perceptuel)
  • Participation sollicitée en continu (durée limitée de l’implication)

2.2.1 Connaissance des enjeux et des acteurs du milieu

Tout processus visant l’acceptabilité d’un projet exige beaucoup de collecte de données et de recherche d’informations afin d’acquérir une bonne connaissance du milieu, et ce, avant même d’entamer toute autre démarche. En effet, un processus décisionnel dans un contexte de gouvernance participative requiert une grande compréhension des enjeux locaux et des acteurs impliqués si l’on souhaite établir un lien de confiance avec les intervenants.

Selon l’OCPM (Office de consultation publique de Montréal), il est primordial d’avoir une bonne connaissance du milieu dans lequel la participation évoluera et du type de personnes qui pourraient s’impliquer, donc d’acquérir une bonne connaissance du milieu socio-économique (ex. population, culture, fonctionnement du milieu municipal, etc.). Pour ce faire, l’Office propose trois moyens (2005-A : 14) :

1. Prendre connaissance des données socio-économiques du milieu où l’événement se tiendra (si elles sont disponibles):

Les municipalités proposent souvent des profils socio-économiques, comprenant notamment la composition de la population et ses habitudes. Cela peut parfois vous aider à nuancer les perceptions que vous avez à propos du milieu et même vous amener à découvrir des réalités inattendues. De très nombreuses informations gratuites (ex. âge, migration, sexe, niveau de scolarité, revenus, communautés culturelles, etc.) sont disponibles sur le site Internet de Statistiques Canada et sur celui de l’Institut de la statistique du Québec, ou encore auprès des municipalités régionales de comté (MRC) et des centres locaux de développement (CLD). Il est aussi pertinent de faire la même démarche avec les acteurs de l’eau du milieu tels que les organismes, les entreprises, le milieu municipal, etc. L’OBV Témiscamingue a d’ailleurs utilisé un sondage préliminaire afin de mieux connaître le milieu avant d’entamer le processus du PDE et de consultation publique.

Zoom sur les OBV :

OBV TÉMISCAMINGUE

Élaboration d’un sondage exploratoire visant à mieux connaître le milieu

L’OBV a élaboré un sondage exploratoire dès le début de l’existence de l’OBV afin de mieux connaître son milieu et ses préoccupations. Le sondage était simple, ouvert, rapide à remplir et ne comportait que quatre questions s’adressant aux acteurs de l’eau du milieu (organismes, entreprises, municipal, etc.).

Ces questions portaient sur les préoccupations des acteurs quant à la GIEBV, les actions liées à l’eau mises de l’avant (faites ou prévues) par l’acteur, les priorités d’actions à propos de l’eau et de la GIEBV et la façon dont ces acteurs de l’eau préféreraient être consultés.

Même si ce sondage était préliminaire, il a le mérite de pouvoir avoir dès le départ une idée du milieu dans lequel l’OBV évolue.

Cliquez ici pour voir le questionnaire type développé par l’OBV.

2. Examiner les articles de presse parus dans les journaux locaux

Ces articles peuvent vous aider à acquérir une vue d’ensemble, à prendre connaissance d’enjeux locaux d’actualités et à avoir une idée des valeurs de la population. Ils peuvent aussi permettre de connaître les principaux organismes ou interlocuteurs ainsi que certaines problématiques existantes. Parfois, il est aussi possible de savoir si, par le passé, le projet ou les actions du PDE que vous présentez ont déjà été proposés et, si oui, vous pouvez peut-être tenter de déterminer les points forts et faibles afin de ne pas répéter les mêmes erreurs.

Dans le même ordre d’idée, le ROBVQ propose aussi de faire une revue historique du bassin versant. Connaître l’évolution du cours d’eau, de son aménagement, des liens de la population avec ce dernier et de ses usages représente des données historiques intéressantes qui peuvent permettre une meilleure compréhension de la population et de ses actions, réactions et comportements dans le présent. Ces données historiques pourront être validées et complétées lors de la consultation sur les perceptions sociales, au tout début du portrait.

Zoom sur les OBV :

ABV DES 7

Revue historique du bassin versant

Dans le «projet IDeaux», la première étape a été de «reconstituer à partir de cartes, de plans de villes, de cartes postales et de missions aériennes, une analyse diachronique concernant le ruisseau de la Brasserie, afin d’identifier les interactions entre le ruisseau et l’évolution des stratégies urbaines, principalement de l’entre-deux-guerres à nos jours (Brun, A. et Samson, P. (2010), p.8)».

Il est aussi possible d’utiliser les archives des bibliothèques, des villes ou du gouvernement, ou encore de faire des entrevues avec des gens présents dans le milieu depuis longtemps. Pour la démarche complète de ce projet, voir la page Exemples de démarches complètes.

3. Consulter le répertoire des organismes oeuvrant dans le milieu (s’il est disponible):

Les municipalités, les MRC et les CLD peuvent parfois offrir une forme de répertoire des organismes, associations et institutions qui sont présents dans le milieu. Vous pouvez également vous référer à la liste de démarrage de l’OBV, lorsque vous avez communiqué avec l’ensemble des organismes pertinents de votre zone. Ces derniers représentent des acteurs pouvant possiblement participer à la démarche d’élaboration et de mise en oeuvre du PDE, c’est donc un atout d’avoir une idée des buts poursuivis par ceux-ci.

Conseil de l’OCPM (2005-A : 14) : il peut être utile de dresser une première liste regroupant les noms des organismes susceptibles de porter un intérêt immédiat à votre processus (découlant de leur secteur d’activité par exemple), ainsi qu’une seconde liste colligeant des organismes pouvant constituer en de bons relayeurs d’information suite à aux activités d’implication des citoyens et acteurs de l’eau. L’OBV Témiscamingue a utilisé ce genre de liste.

Zoom sur les OBV :

OBV TÉMISCAMINGUE

Élaboration d’une liste des organismes et entreprises du territoire

Dès le début de son implantation, l’OBV Témiscamingue a contacté les MRC du territoire afin de lister tous les organismes et entreprises présentes dans le milieu. Une fois cette première liste établie, l’OBV a validé auprès des organismes et entreprises si les contacts étaient bons et quelques fois, ces derniers ont mentionné d’autres partenaires potentiels que l’OBV n’avait pu lister au départ. La liste a donc été validée et bonifiée.

Au départ, le but était simplement d’avoir ces contacts pour leur faire parvenir des invitations aux activités de l’OBV. Lorsque l’OBV en sera à l’étape des consultations publiques, il pourra certainement utiliser cette liste et bénéficier, dans certain cas, du premier contact déjà établi lors de la validation de la liste auprès des organismes et entreprises.

La liste représente un bon outil qui, utilisé de façon complémentaire à d’autres façons de faire, (par exemple aux visites en personne à certains partenaires) peut donner de bons résultats.

Ces trois moyens, combiné à l’économie d’expériences effectuée lors d’une première rencontre, devrait permettre à l’OBV d’avoir une bonne idée du milieu présent et passé dans lequel il évolue, ce qui ne peut que faciliter les actions à poser pour susciter la participation citoyenne.

2.2.2 Implication d’un maximum d’acteurs en amont du processus décisionnel

Une bonne façon d’obtenir la collaboration des acteurs du milieu est de les impliquer le plus tôt possible dans le processus. En ce sens, il est important de cibler les intérêts de chacun afin d’éviter de tomber dans une guerre de positions mais plutôt de travailler dans un climat de respect et de compréhension. Dans un contexte de gouvernance participative misant sur la prises de décision par les citoyens, il est primordial d’inclure ceux-ci au tout début afin qu’il sente avoir une réelle influence sur les décisions.

L’implication en amont favorise aussi la coopération et permet d’éviter les mauvaises surprises. Dans le même sens, l’implication d’un maximum d’acteurs permet la prise en compte de la diversité des points de vue qui est indispensable à la mise en place d’un climat de collaboration. D’ailleurs, l’implication des différents usagés de l’eau procure une connaissance plus précise des caractéristiques des systèmes naturels et assure un lien plus direct entre les participants et les conséquences de l’exploitation de la ressource. Voici quelques formules possibles :

1. La cartographie des potentiels et problématiques

Lors d’un consultation préliminaire des citoyens, la cartographie des potentiels et problématiques pourrait être utilisée afin de définir les perceptions de la population. Cette stratégie toute simple vise à identifier sur une carte du bassin versant, les principaux potentiels et les principales problématiques soulevés par la population. Cette démarche permet d’abord d’illustrer les perceptions de la population. D’ailleurs, une telle cartographie, réalisée de façon interactive, peut constituer une bonne stratégie pour faire interagir les personnes présentes aux diverses rencontres. Cette cartographie peut ensuite être croisée avec les données techniques du portrait. Cette démarche permettrait alors de vérifier si les perceptions populaires correspondent aux réels problèmes du bassin versant. Cette analyse de compatibilité des données techniques et de perception pourra ensuite aider l’OBV lors de l’élaboration de son plan d’action.

2. La cartographie des demandes sociales

Cette stratégie consiste simplement en l’identification des priorités de la population sur une carte du bassin versant. Il s’agit d’un outil visuel, facilitant l’interaction avec le public lors de la de périodes d’échanges collectifs. En effet, ce dernier pourrait être amené à identifier sur la carte les principales actions à entreprendre sur leur territoire (par exemple, leur sous- bassin versant), à partir de celles proposées par l’OBV.

Il en résultera alors une cartographie des éléments qui devraient être réalisés en priorité dans le plan d’action du plan directeur de l’eau.

Zoom sur les OBV :

OBV Matapédia-Restigouche

Cartographie active des demandes sociales

Dans le cadre de la réalisation de son plan directeur de l’eau, l’organisme de bassins versant Matapédia-Restigouche a opté pour une approche de recherche participative afin de colliger les données pour son portrait, son diagnostic, de même que pour l’élaboration de son plan d’action. En plus des publicités diffusées dans divers médias et des affichages placés dans les lieux publiques, une lettre d’invitation a été envoyée à tous les secteurs d’activités afin de prendre part au processus selon leur zone géographique de bassin versant. Les participants ont mis en commun leur connaissance locale en utilisant la cartographie et en répondant simultanément à un questionnaire. Le tout a été fait en respectant un code d’éthique de participation, adopté par les acteurs. Les participants ont alors décrit plusieurs caractéristiques et ciblé des problématiques de leur secteur géographique entre autres les eaux usées, l’érosion des sols, la qualité de l’eau potable, les activités du castor.

À partir de ces données, l’élaboration du plan d’action a débuté collectivement avec la table de concertation. Les préoccupations sont devenues des orientations consolidées. Parallèlement, des rapports techniques furent rédigés pour certains sous-bassins afin de confirmer la recherche participative. Une révision collective et individuelle fut ensuite réalisée par les membres de la table de concertation afin de valider le contenu du portrait et du diagnostic. La responsabilisation de la mise en oeuvre a germé grâce à l’implication directe des acteurs ainsi que de diverses tables sectorielles dans l’élaboration des objectifs et des pistes d’actions du plan directeur de l’eau.

3. La consultation en continu des comités locaux

Les OBV peuvent se doter d’une structure permanente de consultation en faisant appel à des comités locaux de sous-bassins. Ces derniers peuvent alimenter l’OBV à chaque étape de la réalisation du PDE en mettant à profit les connaissances et l’expertise locale.

Zoom sur les OBV :

COGESAF

Comités locaux

Étant donné la grandeur de plusieurs des territoires de bassins versants ou des zones de gestion par bassin versant, la création d’un comité local de bassin versant permet de regrouper l’ensemble des acteurs à une échelle qui favorise le développement d’un sentiment d’appartenance. Les comités locaux de bassin versant (CLBV) sont des comités de concertation mis en place pour la réalisation des actions proposées par l’OBV dans le cadre de son plan directeur de l’eau. Les comités locaux ont plusieurs rôles dont :

  • Échanger sur les projets d’actions proposés par le COGESAF en fonction des problèmes présents sur le territoire du bassin versant local.
  • Valider les actions terrain à réaliser et procéder au suivi de leur mise en oeuvre. Les actions concrètes doivent être réalisables en tenant compte des conditions socio-économiques.
  • Réalisation d’actions en lien avec le plan directeur de l’eau du COGESAF.
  • Accompagner le COGESAF pour la négociation et la signature de Contrats de bassin.

Facteur limitant l’implication : l’ironie ordinaire

Bien connue par rapport au monde politique, l’ironie ordinaire fait référence à une forme de lucidité ou de désenchantement populaire vis-à-vis du monde public. Ce type d’attitude entraîne un immobilisme qui s’avère être très néfaste dans un contexte de participation citoyenne.

L’ironie ordinaire est certainement un problème de confiance de la population envers les mécanismes de participation. Plusieurs raisons peuvent être à l’origine de pareille attitude dont des antécédents partagés qui ont «fait la preuve» que les décisions revenaient finalement aux plus influents, que les élus n’avaient d’oreille que pour certains interlocuteurs privilégiés, que les décisions se prennent en arrière-scène, etc.

Il en va de même pour les sciences et les scientifiques qui se retrouvent souvent discrédités dans l’opinion populaire pour plusieurs raisons, notamment les liens entretenus entre certains experts et les industriels, ou bien en raison de nombreuses études finalement infirmées ou encore de l’incertitude face à certains phénomènes (ex: les changements climatiques), etc. De plus, certains OBV pourraient se voir perçus comme les détenteurs du savoir scientifique avec qui il est impossible de faire valoir ses préoccupations, ou encore qui a déjà un parti pris pour ses propres hypothèses ou résultats d’études.

On peut alors s’interroger sur l’utilité du processus de participation mis en place par un OBV s’il ne parvient pas à susciter la confiance et l’attrait du public. Qui plus est, l’implication des acteurs en amont à un projet sera grandement compromise en raison de pareille attitude. D’un autre côté, la prise en considération des acteurs du milieu et de leurs intérêts en début de processus vise précisément une plus importante adhésion au projet en instaurant un climat de collaboration redonnant confiance à la population envers les mécanismes de participation.

Les démarches participatives actuelles tendent effectivement à insister sur l’implication en amont des citoyens afin d’éradiquer ce genre de problème. Par contre, «l’impasse de l’amont», illustration fournie par S.Rui (1999), explique bien que le public n’est intéressé à s’impliquer que vis-à-vis des projets bien concrets. Comment alors parvenir à impliquer les simples citoyens dans l’élaboration et la mise en oeuvre d’un plan directeur de l’eau ?

Avant de tenter d’appliquer tout type de solution envers ce type de problème, mieux vaut en connaître l’origine. Dans le cas des OBV du Québec, beaucoup d’incompréhension face au véritable rôle de ces organismes peut expliquer le scepticisme à leur égard. Faire connaître ou rappeler le mandat des OBV aux citoyens et aux partenaires est forcément de mise en ce sens.

Exemples de réflexions illustrant l’attitude d’ironie ordinaire

L’ironie ordinaire
«Tous les biologistes du Québec pourront bien nous inciter à végétaliser nos berges, nous ne voyons vraiment pas ce que ça changera pour notre lac. Qu’en savent-ils vraiment?»
«Le gouvernement nous a déjà subventionné pour rectifier nos cours d’eau dans les années 70, maintenant on nous dit de les laisser suivre leur cours naturel, qu’est-ce que ce sera dans 20 ans?»
«Ils ont beau nous demander d’arrimer nos PDE aux SAD, de toute façon ce sera les MRC et le gouvernement qui décideront d’en appliquer ou non le contenu.»
«Pourquoi assister à la table de concertation de l’OBV alors qu’on sait très bien qu’ils veulent nous empêcher de faire notre barrage pour des histoires de poissons. Ce sont tous des écologistes qui travaillent là.»

2.2.3 Arène de communication propice aux échanges constructifs et arrimée aux attentes des parties prenantes

Un climat de confiance et de respect mutuel est essentiel à la réussite d’une démarche d’acceptabilité sociale. Le mode de communication employé aura un impact différent sur le type d’échanges qui seront entretenus selon qu’il permettra ou non la compréhension des intérêts de chacun, de mettre en contexte les perceptions et de réduire le bruit perceptuel.

Prenons par exemple une situation où ce ne sont pas les parties prenantes qui sont invitées à s’engager mais plutôt les parties prenantes elles-mêmes qui engagent. C’est souvent dans une situation de mécontentement que ce type d’événement se présente. Le mode de communication choisi peut alors mal se prêter à des échanges constructifs. En effet, lorsque certaines parties prenantes demandent aux promoteurs de rendre des comptes, certaines arènes peuvent amplifier le phénomène (les journaux, les bulletins télévisés, etc.) Certaines crises pourraient alors être issues d’une mauvaise perception des points mis de l’avant par chacune des parties.

Il est aussi important de choisir un processus qui s’arrime bien aux attentes des parties prenantes. Selon les intervenants concernés par le projet, le mode de communication et le moment choisi les plus appropriés pour délibérer ne seront pas nécessairement les mêmes. Une consultation préalable sur les modes de collaboration préférés est donc de mise.

Peu importe le moyen choisi, il peut être très intéressant d’utiliser les questions suivantes afin de se doter d’une structure d’analyse permettant de bien identifier les intérêts de chacune des parties prenantes, et ce, avant, pendant et après les délibérations :

Questions pour se doter d�une structure d�analyse permettant d'identifier les int�r�ts de chacune des parties prenantesDe plus, il est toujours pertinent de ramener les bénéfices de l’avant afin de rallier les participants autour de ces derniers et d’éviter les dérapages inutiles.

Un document intéressant de Nicolas Fontaine, Élise Demers et François Talbot (1983) propose un modèle à prendre en considération pour augmenter la motivation des gens à participer aux activités en tenant compte de quatre composantes essentielles soit l’appartenance, le pouvoir, le plaisir et la liberté.

Séance d’information et d’échanges facultative

Selon le temps et le budget dont dispose l’OBV, il est recommandé de mener une séance d’information et d’échanges facultative avec la population et les acteurs de l’eau avant même d’entamer l’élaboration du PDE. Cette séance pourrait résulter en la formation d’une communauté d’apprentissages et aurait pour but de présenter l’OBV et ses mandats, la permanence ainsi que les membres de la table de concertation et de débuter les échanges et faire connaissance. De plus, il pourrait être intéressant d’utiliser ici les concepts d’économie d’expérience , de reconnaissance de la légitimité de l’autre ainsi que de l’accord initial. Si ce n’est pas possible, la création de la communauté d’apprentissages pourra toujours se faire lors de la première consultation visant à récolter les perceptions de la population.

L’importance d’une bonne communication entre les participants

Le Conseil de l’eau de l’Alberta a développé un guide intitulé «Consensus decision-making toolkit» et, parmi tous les outils proposés, ceux à propos de la communication pourraient s’avérer être très intéressants pour les consultations publiques ou autres activités d’implication des citoyens et acteurs dans le contexte du PDE (ce guide est cependant très intéressant pour des conseils quant à la façon de mener une table de concertation).

Conseil pour une bonne communication entre les participants et, du même coup, pour un meilleur déroulement de la rencontre (Conseil de l’eau de l’Alberta, 2010, p.16 et 38):

  • Si possible, qu’une personne ressource soit présente pour agir à titre de facilitateur et pour encourager les bons comportements de communication, par exemple écouter les autres avec une écoute active, utiliser des questions ouvertes pour susciter la discussion et adopter un comportement réfléchi et non pas réactif. Elle peut aussi faire participer les personnes plus réservées et qui parlent peu car elles aussi doivent faire part de leurs intérêts. Elle peut aussi mener la discussion lorsqu’il y a des sujets plus délicats à aborder.
  • Laisser le temps à chacun de bien exposer ses perceptions, ses intérêts et ses préoccupations (en lien avec le concept de reconnaissance de la légitimité de l’autre).
  • Ne pas hésiter à poser des questions de clarification, respecter les différents points de vue et idées, construire avec le savoir commun.
  • Structurer les rencontres selon différentes formes : tables rondes, présentation par un expert, suivie de questions et réponses, une mise à jour à propos de l’avancement du processus (ex. comment les participants se sentent, comment ça se passe pour tout un chacun, des points à améliorer/préciser, etc.), ateliers en petits groupes. Comme chaque personne ne réagit pas de la même façon à un type d’activité, en utiliser plusieurs maximise les chances que tous les participants aient dit leur mots.

Plusieurs autres outils sont existent afin de permettre des échanges constructifs lors de rencontres en tous genres :

Exercices de Pierre Deschênes (UQAC) à effectuer lors de rencontres

TRUCS ET ASTUCES:

Optimisation des échanges.

Il s’agit ici de favoriser au maximum les dialogues et les échanges entre les participants. Les échanges lors de rencontres de consultation publique ou de tables de concertation sont plus fructueux lorsque du temps est réservé aux discussions dirigées et à la verbalisation des acquis.

Il serait donc intéressant que les OBV accordent le temps nécessaire lors de leurs rencontres de consultation ou de concertation pour de telles périodes d’échanges. Les acteurs de l’eau doivent avoir la parole et devenir des participants actifs des rencontres pour faire part de leurs préoccupations, de leurs connaissances, de leurs réalités, de leurs idées, etc. Il peut d’ailleurs être bénéfique d’amener les participants à de telles rencontres à verbaliser leurs points de vue et surtout, leurs apprentissages.

Dans ce cadre, le rôle de l’organisme est d’animer, de prioriser et d’encadrer minimalement ces périodes d’échanges, en plus de prendre note des remarques afin d’en faire un suivi adéquat. Il doit identifier et mettre en oeuvre des stratégies d’animation qui favorisent la participation des personnes présentes et non leur écoute. De cette manière, l’organisme saura assurément répondre plus conformément aux réalités et aux besoins des acteurs de l’eau.

Zoom sur les OBV :

COPERNIC

Tables rondes lors des consultations publiques

Dans le but de favoriser les échanges entre intervenants de différents secteurs d’activités, l’OBV Copernic a opté pour une journée de tables rondes afin de réaliser sa consultation publique sur les enjeux et problématiques pour élaborer le plan d’action de leur PDE. Ainsi, des représentants des secteurs agricole, forestier, municipal, etc. devaient se pencher sur chacun des enjeux pour une période d’une heure trente. Un membre de l’équipe de Copernic agissait à titre d’animateur à chacune des tables afin de diriger la conversation et ainsi faciliter les échanges constructifs et l’établissement d’un climat de respect.

2.2.4 Présence d’un sentiment d’appartenance au projet

Il est préférable que les participants à une démarche s’identifie à cette dernière afin d’en assurer la réussite. La fierté issue de l’implication des parties prenantes à un projet assurera leur adhésion aux décisions et leur participation en continue. Il importe pour ce faire de valoriser l’apport de tous les participants, de leur attribuer certaines responsabilités et de les tenir informés des détails.

Des projets de grande envergure amènent généralement une forte adhésion de la population. En effet, comme mentionné dans la section sur l’implication en amont des acteurs, la présence d’un projet concret peut s’avérer être une bonne façon de rassembler les citoyens au tour d’un dénominateur commun, comme dans l’exemple suivant :

Zoom sur les OBV :

OBAKIR (Fouquette)

Préservation de l’habitat de l’éperlan

À l’origine même de la création du comité de bassin de la rivière Fouquette (aujourd’hui OBAKIR), l’éperlan arc-en-ciel s’est retrouvé à la source de toutes les actions entreprises pour améliorer la qualité de l’eau de ce bassin versant. En souhaitant préserver l’une des dernières frayères d’éperlans de la population du sud de l’estuaire, les citoyens ont mis sur pieds le comité et ont fait de l’éperlan un véritable emblème régional. Toute la population locale pouvait observer les pêches d’éperlans sur glace dans la région de Rivière-du-Loup et ressentait donc la responsabilité de protéger la frayère de la rivière Fouquette.

L’éperlan s’est ainsi présenté comme un dénominateur commun ralliant les acteurs du milieu et favorisant leur action. Bref, la cause de l’éperlan aura permis d’établir une vision commune à laquelle la communauté s’est identifiée et pour laquelle la participation allait de soi.

Plusieurs autres actions à une plus petite échelle peuvent animer le sentiment d’appartenance des citoyens tout en favorisant la reconnaissance de l’OBV. Par exemple, de nombreuses initiatives locales peuvent être supportées par l’OBV par le biais de financement, d’un apport d’expertise, de coordination, etc. Autre exemple intéressant, les ententes de conservation volontaire et les cahiers du proprio entraîne un fort sentiment d’appartenance de la part des propriétaires. Sous forme d’engagement moral, les individus ainsi impliqués se sentiront davantage concernés lors de consultations ou de prises de décision ayant un impact sur l’enjeu en question.

Bref, certains projets impliquant que l’OBV soit très actif et présent dans le milieu, et surtout des projets ayant pris forme suite à des préoccupations citoyennes, peuvent entraîner et motiver la participation citoyenne. Pour que les activités de sensibilisation et de mobilisation de la population fonctionnent, les OBV devraient donc axer sur les projets concrets (la concertation par l’action) et ayant des résultats positifs.

2.2.5 Prise en compte des perceptions et des représentations sociales

Les individus étant influencés par un nombre imposant de facteurs (âge, sexe, culture, éducation, circonstances d’un projet, expériences personnelles, etc.), il serait inopportun de ne pas intégrer les perceptions aux analyses sociales menant à un projet de nature collective. En effet, l’interprétation des parties prenantes face à un projet peut varier grandement en raison de ces facteurs.

L’analyse et le suivi des perceptions

La collecte et l’analyse des perceptions s’avère alors être l’outil de base afin d’éviter la mauvaise compréhension des enjeux entre les parties prenantes. L’analyse des perceptions mesure l’écart qui existe entre la réalité technique et la réalité telle qu’elle est perçue. En présence d’un grand écart entre la perception des intervenants et la réalité technique, cela signifie qu’il subsiste des zones d’ombres, des inconnues et que des ajustements sont nécessaires afin d’obtenir un accord des participants (ex: diffuser de l’information, recherche de nouvelles données). Un chapitre porte d’ailleurs sur l’analyse des acteurs dans le dernier Guide pour l’élaboration d’un plan directeur de l’eau du MDDEP et propose une méthodologie à cet effet (Gangbazo, 2011, Chapitre 9).

Autre point important, l’implication en amont des acteurs permet d’éviter les écarts de perception. En effet, plus le lien est étroit entre le percevant et le projet, moins il y a de chances que l’information soit déformée pendant son traitement par d’autres facteurs que ceux liés au percevant lui-même.

De plus, des représentations sociales, c’est-à-dire des idées issues de la collectivités et prises pour acquises, peuvent être à la source de l’acceptabilité ou non d’un projet. Par exemple, on pourrait rejeté d’emblée un projet en raison d’une croyance populaire non fondée scientifiquement mais tenue pour vraie au sein de la communauté. L’identification au préalable de ces représentations permettra d’éviter les mauvaises surprises et éventuellement, de les rectifier. Il s’avérera par conséquent pertinent pour un OBV de s’attarder à ces représentations plutôt qu’aux perceptions individuelles qui n’auront pas la même incidence sur l’opinion public. L’analyse des perceptions devrait non seulement permettre de mesurer l’écart perceptuel, mais aussi d’identifier les représentations sociales.

Le bruit perceptuel

Dans le contexte de l’élaboration d’un PDE, la confrontation de valeurs et d’intérêts différents peut mener à de fortes divergences d’opinions. Certaines de celles-ci, sans être de la tendance centrale statistique, peuvent de par leur intensité, particularité ou profil associé, prendre une place considérable dans les discussions. C’est ce que l’on nomme le bruit perceptuel. Ce dernier peut avoir un impact non négligeable par rapport à un projet donné allant jusqu’à en provoquer l’échec. Il s’agit donc d’un autre facteur à évaluer afin, si nécessaire, d’apporter les correctifs qui permettront d’éviter l’échec du projet.

2.2.6 Participation sollicitée en continu

Si l’implication des acteurs est importante en début de processus, elle l’est tout autant à chacune des étapes du projet. Une véritable démarche de participation citoyenne requiert en effet l’implication en continu des acteurs, de façon à les tenir informés de toute nouvelle information, de prendre note de nouvelles données, de les consulter et de faire le suivi des perceptions. L’OBV devra donc mettre en place des activités ou des mécanismes (canaux) ayant pour but de faciliter une implication soutenue des intervenants, mais aussi lui permettant de tirer profit de période de forte participation comme l’explique la section suivante sur la durée limitée de l’implication.

Zoom sur les OBV :

CAPSA

Comités consultatifs par Internet

Les comités permettent principalement une amélioration du transfert d’information ainsi que la possibilité d’obtenir aisément un retour (feed-back) suite à un évènement ou une action. La mise en place de comités consultatifs sur les trois « bassins versants » de notre territoire permet la consultation « en continue » d’un échantillon de la population, une dynamisation des échanges et une meilleure relation entre l’OBV et les citoyens. Ces comités fonctionnent « virtuellement » et ne possèdent pas d’obligation de rencontre. Ils permettent principalement une amélioration du transfert d’information ainsi que la possibilité d’obtenir aisément un retour (feed-back) suite à un évènement ou une action.

La durée limitée de l’implication

L’implication des citoyens à un projet n’est pas stable dans le temps, c’est-à-dire qu’elle augmente et diminue constamment en fonction de plusieurs facteurs qui font varier la stimulation des participants. Il y a donc des « creux de vagues » pendant lesquelles la participation sera plutôt faible et des « sommets de vague » où elle sera plutôt élevée. Il sera alors pertinent d’apprendre à tirer profit des vagues de haute participation. Par exemple, lors du lancement d’un nouveau projet ou en période de crise comme lors des éclosions de cyanobactéries de 2007, plusieurs citoyens pourront s’intéresser au sujet, puis avec le temps, leur nombre diminuera et pourra même atteindre un niveau parfois trop bas pour assurer la poursuite des activités.

Puisque nous souhaitons l’implication des acteurs à chacune des étapes de l’élaboration du PDE, il semble que la mise en place d’une stratégie de « stimulation des citoyens » à l’intérieur d’une plus vaste stratégie de participation citoyenne soit de mise, ou du moins, une stratégie visant à tirer profit des périodes de forte participation. Ainsi, comme l’illustre le graphique suivant, diverses activités devront être planifiées dans le temps afin de susciter l’intérêt des parties prenantes. Le graphique démontre aussi le nombre d’acteurs impliqués grandissant d’une étape à l’autre (ligne de couleurs). En effet, à chacune des activités, on devrait parvenir à atteindre de nouveaux acteurs, puis reprendre chacune des étapes avec toujours plus de participants.

Figure 2. Cycles d’implication citoyenne